Le destin, c'est relatif.
Le destin s’acharne, eh bien qu’il le fasse.
Moi je suis un dur, qu’il s’occupe donc de ses affaires.
Le destin moi Monsieur, j’en fais mon affaire.
« Contre vents et marées » dit-on.
Et je suis de ceux-là.
Le destin c’est pratique quand on a tout raté.
« Eh oui, jamais la chance ne m’a souri » .
Et gna gna gna et gna gna gna.
Quand on est à la barre, on ne va pas lâcher à la moindre tempête.
Et puis, que penserait l’équipage ?
Le destin a bon dos, c’est rien de le dire. Pas besoin d’être soldat pour se défendre contre ses propres faiblesses.
« Et tout me tombe dessus, on croirait qu’on me vise.
Maudit à jamais, voilà ma devise » .
Moi je ne suis pas fort, je doute à chaque instant, mais je fais de mon mieux.
Si le destin s’acharne, eh bien qu’il le fasse.
Moi je n’ai pas flanché.
Suis-je un surhomme ? Certes non, bien au contraire !
Je ne cherche ni responsable, ni excuse. Ou quelque Dieu là-haut qui m’aurait abandonné.
Suis-je heureux ? Je ne sais pas. Quelqu’un peut-il m’en donner la définition ?
Ai-je la conscience tranquille ? Certes oui, n’est-ce pas là l’essentiel ?
Suis-je serein? Je le crois oui, avec l’âge on se contente au moins de ça.
N’est-ce pas l’essentiel?
Le bonheur a fait son temps, place aux jeunes.
Enfin le bonheur, c’est beaucoup dire. Quelques rayons de soleil entre deux averses.
Tout est merveilleux quand on est môme. Ado , on plane et on refait le monde. Après, les années d’insouciance durent plus ou moins longtemps.
Soit on fait des études, soit on trime plus tôt.
Le destin encore, et le refrain sur les inégalités sociales.
« Mon fils, j’ai rencontré le patron de l’usine. Pas de soucis à te faire, il t’attend. » .
Et pas moyen de faire autrement. Quel privilège vraiment !
Lorsque les saisonniers s’entassent au petit jour dans le camion, ou derrière le tracteur, ils en prennent pour dix heures. Le soir ils reviennent dans les baraquements. Leurs familles recevront les mandats pour survivre.
Les « petites mains » ou « les invisibles » s’agitent un peu partout. Elles se font discrètes et travaillent dans l’ombre avant les heures d’ouverture, au moment où les barons du travail commencent leur journée.
Des barons, des forçats, est-ce vraiment nouveau ?
Le destin a permis la Révolution Française, « J’en suis fort aise. » , pour citer qui vous savez.
Nos grands parents, ou les arrières, ou les arrières arrières, et ainsi de suite, n’ont connu que le labeur ou les guerres.
Que sont nos petits malheurs aujourd’hui ?
Ai-je souffert de la solitude ? Certes oui, la moitié de ma vie.
Mais d’autres aussi, aujourd’hui ou jadis.
Je n’ai connu ni la guerre, ni la faim, ni la dictature.
Suis-je heureux pour autant ? Pas vraiment. Mais il faut bien reconnaître que tout ne se vaut Pas.
Maudire son sort et se lamenter, je l’ai fait moi aussi. Bien trop souvent je dois l’admettre.
Mais c’est humain, il faut bien se faire remarquer.
Lorsqu’on prend du recul, si on fait un bilan, on se dit qu’après tout le destin n’y est pour rien.
On tient la barre, on la tient bien. Pourtant le bateau coule, heurté par les récifs.
On avait la boussole, les cartes et la longue vue. On ne les a pas vus.
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