Il était une fois un Grand n’Importe Quoi. Il régnait sur un monde sens dessus dessous. Les êtres sans raison vivaient sans trop savoir ni comment ni pourquoi. Les petits naissaient dans l’indifférence générale.On tâtonnait, on naviguait à vue sans boussole, sans compas, des objets interdits et sensés ne pas être connus.
On se croisait à peine, sans se saluer, sans un regard. Un peuple hagard et soumis sans trop savoir à qui, à quoi.
Les vieux se cachaient, les jeunes ne connaissaient même pas le sens du verbe « oser » .
Bien sûr les rumeurs circulaient, des contes à dormir debout, sur un passé fantasmé.
Autrefois, parait-il, il y avait des familles, des écoles, des crèches et encore bien des choses.
L’armée silencieuse et décérébrée restait impassible, mais le doute s’insinuait. Sous le manteau, des publications évoquaient des jours fériés, des anniversaires, des fêtes des mères, des pères, des grands-mères, et plein d’autres fantaisies, de foutaises.
Un cercle séditieux, qui prenait de grands risques, conservait d’anciens dictionnaires et des gros bouquins qu’on nommait encyclopédies. On n’osait pas prononcer certains mots comme roman, philosophie, ou autres.
Tout comme le Graal, dont ils avaient entendu parler, entre initiés, cela va sans dire, on apprenait des concepts interdits.
La compassion, la tendresse, mais surtout, passible de la peine capitale, l’Amour.
Quoi de plus fascinant, au-delà du vertige d’enfreindre les règles d’un monde déréglé par définition, l’Amour. Tous avaient ce mot en tête. Ils brûlaient d’envie de le dire tout haut.
Que l’on puisse attacher de l’importance à un être, quelle hérésie.
Mais tous se taisaient. Partout des chasseurs patentés et zélés veillaient à préserver le chaos.
Pour tout dire, on vivait comme les crabes, surveillant ses arrières et marchant de côté.
Commentaires
Enregistrer un commentaire